jeudi 14 février 2013


Paroles de flic


, par G.Moréas(http://moreas.blog.lemonde.fr/2012/09/06/apres-laffaire-neyret-comment-gerer-les-indics/)

Après l’affaire Neyret, comment gérer les indics ?

Plusieurs grosses pointures de la police sont venues soutenir Michel Neyret devant le conseil de discipline. Il serait un peu léger de n’y voir que du copinage. Car les ennuis judiciaires et administratifs de ce grand professionnel de la lutte contre le banditisme vont plus loin que son cas personnel et risquent de modifier en profondeur le fonctionnement même de la police judiciaire.
Bien sûr, on peut estimer que les méthodes anciennes ont vécu. Mais dans ce cas, par quoi les remplace-t-on ? Les techniques et la science ? La police technique et scientifique prend effectivement de plus en plus d’importance dans les enquêtes, au point parfois de juguler les enquêteurs. La découverte de cette petite fille prostrée sous deux cadavres, dans la BMW découverte criblée de balles, près du lac d’Annecy, en est la démonstration par l’absurde. On gèle une scène de crime – donc l’enquête – en attendant l’arrivée des techniciens. Durant huit heures ! Et si l'enfant avait été blessée ? Cela fait penser à cette mauvaise blague d’école (de police) : Que devez-vous faire en premier en présence d’un pendu ?... Couper la corde, au cas où il ne serait pas mort. On peut d’ailleurs s’étonner que les gendarmes aient fait venir leurs propres techniciens de l’Institut de recherche criminelle, basé dans la banlieue parisienne, alors que le siège de la Sous-direction des services techniques et scientifiques de la police nationale se trouve en périphérie de Lyon. Alors, police-gendarmerie, même rivalité que par le passé... On murmure d’ailleurs Place Beauvau que les deux services pourraient être regroupés au sein d’une nouvelle direction autonome. Cette « autonomie » fait bondir la PJ. La police technique et scientifique doit rester un outil à la disposition des enquêteurs, a rappelé non sans raison l’un de ses patrons.
Personne ne nie l’avancée considérable que représentent la science et les techniques modernes dans la recherche de preuves et d'indices, mais c’est toujours après le crime ou le délit. Or en matière de lutte contre le banditisme, pour être efficace, il faut intervenir en amont.
La police ADN ne marche pas à Marseille.
Bien sûr, on peut planter des écoutes sur les téléphones portables, glisser des balises sous les voitures des suspects, pressurer les dizaines de fichiers, ou pianoter frénétiquement sur les claviers d’ordinateurs, mais… où est le contact humain ?
Autrefois, il y avait autant de règlements de comptes que maintenant et la plupart des enquêtes, comme aujourd’hui, n’aboutissaient pas - mais on savait. On savait pourquoi et par qui. On maîtrisait la structure des bandes et il était même possible de prévoir le nom des prochaines victimes. À défaut de pouvoir empêcher ou réprimer un flingage, on en comprenait les raisons. Cette connaissance du milieu n’existe plus. Or, si l’on veut mettre un frein aux agissements de ces bandes qui gangrènent la région marseillaise, la police a besoin de tuyaux – donc d’indics. Depuis toujours, le système fonctionne ainsi. Même si les flics savent qu’ils jouent avec le feu.
Mais comment « noyauter » ces bandes qui vivent plus ou moins en autarcie ? Eh bien, comme il est impossible d’entrer par la porte, il faut passer par la fenêtre. Car ces jeunots du banditisme ont vieilli. Et peu à peu, ils sont en train de devenir des grands – avec tout ce que cela comporte. Et notamment le désir d’élargir leur environnement, voire de s’en éloigner, afin de mieux profiter de leur bien si mal acquis. Et pour cela, ils ont besoin de complices, des individus tout aussi douteux, mais moins dangereux et surtout beaucoup moins méfiants. Des escrocs, des faiseurs, des enjoliveurs, comme on les appelle (comme ceux que fréquentait Michel Neyret) qui vivent en périphérie du banditisme et qui, pour les enquêteurs, présentent l’avantage d’être visibles. C’est par eux que l'on peut avancer et cerner une équipe de truands. Ensuite, c’est du travail de PJ, presque la routine : surveillances et procédure. Il n'est même pas nécessaire de les prendre la main dans le sac. L’époque du flag est révolue et le code pénal est suffisamment riche pour bâtir un dossier béton pour association de malfaiteurs en emboîtant entre eux des faits qui, à l’unité, ne pèseraient pas lourd devant un juge.
Donc, si l’on veut lutter contre ce néo-banditisme, pas besoin de nouvelles lois, pas besoin de CRS ni de militaires, il faut des moyens de surveillance, de bons procéduriers et… des indics. Pas de ceux que l’on enregistre à la direction centrale et que l’on rétribue avec une poignée de figues (contre reçu, s’il vous plaît). Non, des gens qui sont presque des amis, ou qui peuvent le devenir, et auxquels il n’est pas interdit de rendre de petits services.

Cela nécessite de faire confiance aux policiers. La confiance ! Encore un mot « à l’ancienne ».

mardi 12 février 2013

Premier assassinat à Ajaccio


Le premier assassinat de l'année en Corse a été perpétré mardi à Ajaccio où un gérant d?établissement de nuit connu de la police a été criblé de balles au volant de sa voiture non loin d'une manifestation d'enseignants.
Dominique Lorenzi, 40 ans, surnommé "L'Indien", a été tué à 10H45 à bord d'une petite voiture sans permis qu'il conduisait près du rectorat devant lequel plusieurs dizaines d'enseignants étaient rassemblés pour dénoncer une énième réforme de l'éducation.
"On a d'abord cru que c'était des claquements de pétards", a raconté terrorisée une manifestante.
Une douzaine de balles de calibre 9mm ont été tirées au pistolet automatique sur le véhicule de la victime dont le pare-brise était perforé de quatre impacts à hauteur de la tête du conducteur.
Le guet-apens, sur un mode opératoire très professionnel, avait été tendu par un commando de deux individus casqués à bord d'une moto ou d'un scooter arrivant en sens opposé à celui de la victime sur le boulevard Pascal Rossini, l'une des artères les plus fréquentées de la cité impériale, a expliqué le procureur de la République, Xavier Bonhomme.
Le passager a ouvert le feu sur le conducteur, s'approchant ensuite à pied pour l'achever. Les deux hommes sont parvenus à s'enfuir en se noyant dans la circulation.
Une douzaine de douilles ont été trouvées sur place.
La compagne de la victime qui le suivait en voiture a été hospialisée dans un état de choc.

"Violence extrême"

"C'est malheureusement toujours le même sentiment de tristesse et d'impuissance", a déclaré sur place le maire (DVG) d'Ajaccio, Simon Renucci, à France 3 Corse Via Stella.
Le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, a fermement condamné cet "acte de violence extrême", assurant dans un communiqué que "tous les moyens sont mis en ?uvre pour interpeller les auteurs et les déférer devant la justice".
En attendant, une cellule psychologique a été mise en place au rectorat pour assister les enseignants et autres fonctionnaires présents choqués par cette nouvelle scène d'ultra violence dans un quartier où plusieurs règlements de comptes ont déjà été perpétrés.
Très connu à Ajaccio, notamment des services de police, Dominique Lorenzi gérait un pub de nuit dans la cité balnéaire de Porticcio, le Saint James, sur la rive sud du golfe d'Ajaccio. Un vigile âgé de 19 ans avait été tué par balles dans cet établissement le 25 septembre 2011.
Déjà entendu par les enquêteurs dans plusieurs dossiers criminels dans la région d'Ajaccio, la victime, qui avait géré plusieurs débits de boissons de la cité impériale, n'avait jamais été mise en examen.
La police judiciaire et la section de recherche de la gendarmerie ont été co-saisies pour cette enquête.
Lorenzi est la première victime d'un assassinat depuis le début de l'année en Corse. Deux tentatives ont été commises depuis le 1er janvier, notamment contre un individu déjà condamné par la justice, Christophe Pieri, blessé par balles le 1er février en Haute Corse.


Sans que cela ait forcément une relation il faut rappeler l'assassinat du videur du Saint-James Dimitri Bourgeaud en 2011.

Il s'en était suivi les arrestations de personnes réputées proches du Petit Bar et qui auraient participé à l'assassinat (que des hypothèses) puis celles d'autres personnes soupçonnées d'avoir voulu venger Dimitri Bourgeaud. Néanmoins tout cela reste très flou et très compliqué. D'abord parce que ces associations de jeunes délinquants sont extrêmement mouvantes. En ce moment même se déroule le procès de personnes impliquées dans une cache d'armes à Ajaccio. Je mets au défi Follorou, le journaliste du Monde expert en mafia corse, de trouver une cohérence autre que le chaos qui naît de disputes, de jalousies. Le patron du Saint James était réputé proche du Petit Bar. Il faudrait savoir ce qui se cache derrière cette affirmation. Il était difficile à un moment donné de tenir un établissement à Porticcio sans être taxé de proximité avec le Petit Bar ce qui n'était pas nécessairement vrai. Ensuite, le Petit Bar n'existe plus et les alliances ont du bouger. Donc prudence… Pour l'instant on ne sait pas si tout cela est lié ou pas.







Assassinat de Dimitri Bourgeaud : quatre hommes mis en examen
Publié le samedi 17 mars 2012 à 07h14

Le procureur d’Ajaccio, Thomas Pison, et le colonel Christian Rodriguez, commandant la région de la gendarmerie de Corse se sont dits satisfaits du résultat. Ils se refusaient hier à tout triomphalisme.

La précaution a été utilisée d'entrée de jeu par le procureur Pison, en début de conférence de presse, hier après-midi : « Il y a quatre personnes mises en examen. Mais elles nient toutes les faits qu'on leur reproche. »Pas de triomphalisme donc. Mais, de la part du procureur d'Ajaccio, l'impression que les services de la gendarmerie et ceux de la justice ont travaillé avec efficacité. En début de semaine, après cinq mois d'enquête sur l'assassinat de Dimitri Bourgeaud, quinze personnes étaient interpellées à Ajaccio et dans les environs.
Les gendarmes de la section de recherches de la gendarmerie s'étaient fait appuyer par le GIGN pour procéder à certaines des arrestations. Au fil des jours et des auditions, la plupart des personnes entendues sont ressorties libres de garde à vue. Jeudi soir, Hamza Ouerghi (20 ans) et Pascal Dionisi (43 ans) étaient mis en examen et placés sous mandat de dépôt. Le premier pour subornation de témoin. Le deuxième pour complicité de meurtre en bande organisée. Jeudi soir, Me Aljia Fazaï s'insurgeait contre le placement en détention de Hamza Ouerghi estimant que la prison n'allait en rien permettre à l'affaire de progresser, d'autant son client évolue très à la marge du dossier.

Hier, Me Antoine Vinier-Orsetti tenait à préciser que son client, Pascal Dionisi était mis en examen non pour assassinat en bande organisée (comme cela avait été écrit par erreur) mais pour complicité.« Il s'est largement expliqué lors de sa garde à vue. Il conteste formellement les faits qui lui sont reprochés. Aucun élément matériel ne permet de le relier aux faits », assure Me Vinier-Orsetti. L'avocat précise que la mise en examen de son client vient de « rumeurs colportées qui viennent trop souvent polluer le débat judiciaire... »

Éléments matériels et témoignages

Hier après midi donc, deux autres hommes étaient mis en examen par le juge Hélène Gerhards. Dumè Canale (40 ans) était mis en examen pour complicité de meurtre en bande organisé et Romain Salvini (22 ans) pour meurtre en bande organisée. Les deux hommes ont également été mis en examen pour détention d'armes de 1re et 4e catégories. Au cours des perquisitions, les enquêteurs ont découvert notamment chez Dumè Canale plusieurs armes (armes de poing et fusil-mitrailleur). Les deux hommes nient les faits qu'on leur reproche. Lors de la conférence de presse, le colonel Christian Rodriguez affirmait cependant que les enquêteurs se sont appuyés, tant sur des éléments matériels que sur des témoignages. « Nous n'avons jamais eu d'idée préconçue sur cette affaire et nous n'avons négligé aucune hypothèse »,affirmait-il hier.

Quel mobile ?

Ni le procureur de la République d'Ajaccio, ni le colonel commandant la région de gendarmerie n'ont précisé quel était le mobile supposé de l'assassinat perpétré le 25 septembre à 5 heures du matin sur le parking de la discothèque le Pub Saint-James à Porticcio. À Ajaccio, on évoquait une « guerre » pour la prise de contrôle d'établissements de nuit. Mais on parlait également d'une altercation et de coups entre la victime et d'autres personnes qui n'auraient pas supporté d'avoir le dessous. Aucune de ces deux thèses n'a été confirmée ni infirmée. Et, pour l'heure, il reste difficile de savoir pourquoi Dimitri Bourgeaud est tombé sous une pluie de balles de 11,43, à tout juste 19 ans.
Les personnes interpellées à Ajaccio seraient proches de l'équipe du Petit bar.



(Publié le jeudi 15 mars 2012 à 07h30)

Les auditions se poursuivent dans les locaux de la gendarmerie d'Aspretto, après les interpellations de mardi dans la région d'Ajaccio. Hier, une dizaine de personnes restait en garde à vue dans l'affaire de l'assassinat de Dimitri Bourgeaud. Une personne avait été remise en liberté à l'issue de son audition mardi soir et d'autres pourraient recouvrer leur liberté dans les 24 heures qui viennent. Mais une partie des hommes entendus va très vraisemblablement être présentée au juge Hélène Gerhards avant la fin de la semaine. La magistrate ajaccienne qui a qualifié les faits d'assassinat en bande organisée a délivré un certain nombre de commissions rogatoires aux enquêteurs de la section de recherches de la gendarmerie et attend des réponses par rapport à un certain nombre d'éléments matériels recueillis au cours des cinq mois d'enquête.
De source proche du dossier, on confirmait hier que les personnes interpellées et entendues depuis mardi sont « proches de l'équipe du Petit bar ».Sans toutefois confirmer de manière formelle les identités qui circulent sur la place d'Ajaccio.
Ce qui est certain c'est qu'une partie des personnes placées en garde à vue a été extraite de prison pour être entendue dans cette affaire.

Calibre 11,43

Le 25 septembre dernier, Dimitri Bourgeaud qui achevait une saison comme portier au Pub Saint-James avait été pris pour cible par un unique tireur à la fermeture de l'établissement à 5 heures du matin. Il avait été atteint par plusieurs projectiles de calibre 11,43 (huit douilles avaient été retrouvées sur les lieux) alors qu'il manœuvrait avec sa voiture sur le parking de la discothèque. Au moment des faits, l'hypothèse de la querelle de fin de nuit avait été évoquée. Il semble qu'au cours des mois écoulés, l'enquête s'est orientée dans une toute autre direction.



Des proches de Dimitri Bourgeaud auraient voulu le venger

La justice estime que des proches de Dimitri Bourgeaud, tué en 2011 à Porticcio, ont formé une association de malfaiteurs afin de venger sa mort..
Voulaient-ils constituer une bande afin de venger leur ami Dimitri Bourgeaud assassiné la nuit du 25 septembre sur le parking du pub Saint-James à Porticcio ? Telle est la conviction de la juge ajaccienne Hélène Gerhards qui a mis en examen vendredi quatre hommes pour association de malfaiteurs en vue de commettre un crime.
Certains d'entre eux sont également soupçonnés de vol à main armée en bande organisée et d'avoir par ricochet enfreint la législation sur les armes. « Trois mis en examen ont également été placés sous mandat de dépôt, tandis que le quatrième a fait l'objet d'un contrôle judiciaire. Une cinquième personne est témoin assisté », a confirmé le parquet d'Ajaccio qui n'a pas révélé les identités, mais en indiquant qu'ils sont « tous connus de la justice ».

Coordination police gendarmerie

Deux d'entre eux avaient notamment été condamnés pour l'attaque à la disqueuse du Crédit mutuel à Ajaccio dans la nuit du 5 décembre 2011 et pour d'autres infractions. Selon la justice, ils sont proches de Dimitri Bourgeaud. Quelles personnes étaient-elles visées ? La justice préfère« pour des raisons de sécurité rester muette à ce sujet », mais elle en dénombre au moins deux. L'affaire s'est accélérée au lendemain de la dernière visite ministérielle de Manuel Valls et de Christiane Taubira. Mardi dernier, une personne est interpellée sur le Continent, tandis que trois autres sont extraites de la prison de Borgo et une de la maison d'arrêt d'Ajaccio.
Toutes sont directement placées en garde à vue à la caserne Bacciochi et au commissariat d'Ajaccio pendant 96 heures. Le dossier, une fois n'est pas coutume, est en fait suivi par la police judiciaire et la gendarmerie depuis près d'un an. Les interrogatoires de garde à vue ont d'ailleurs été menés par un policier et un gendarme. « C'est un travail remarquable, un travail de fourmi qui remonte à plusieurs mois », remarque le parquet ajaccien. Le dossier est surtout« emblématique », pour un enquêteur, car il illustre différentes réalités.

Une "planque" retrouvée avec des armes

Tout d'abord, celle de la préparation d'un crime, mais aussi les différents réseaux mis en place. « Une équipe voulait se constituer pour venger Dimitri Bourgeaud avec des personnes multicarte », analyse-t-il. Selon la version étayée par les investigations, le groupe aurait réagi après l'assassinat du jeune homme de 19 ans tué à Porticcio en multipliant les actions.
« Nous estimons que ce groupe est responsable du moto-jacking d'un scooter T-Max à Ajaccio, en novembre 2011 qui aurait pu servir à monter sur des assassinats », poursuit-il. Ces éléments prenaient du relief après l'affaire du casse raté du Crédit mutuel à Ajaccio qu'avaient déjoué les policiers de la Bac (brigade anticriminalité). A l'issue de perquisitions, plusieurs objets étaient retrouvés dans un appartement de la région ajaccienne. « Des armes et les clés du T-Max (qui avait été repeint après le vol) avaient été saisis dans ce lieu qui devait servir de planque », détaille une source proche du dossier.
A partir de ces évolutions transmises par la sécurité publique sur l'affaire du Crédit Mutuel, la juge Hélène Gerhards co-saisit la police judiciaire et la gendarmerie au sein d'une « équipe mixte ».
Une série d'écoutes téléphoniques complète le travail d'environnement.« En plus du matériel qui avait été rassemblé, des repérages avaient été effectués autour du domicile de deux personnes habitant à Ajaccio », décrypte un enquêteur. « On est dans une thématique de vengeance et en agissant ainsi, la justice a fait un travail de prévention », ajoute une source policière.
Selon un avocat d'un des mis en examen qui ne souhaite pas s'exprimer pour l'heure,« cette affaire ne tient pas et semble bizarre ». La suite se jouera de manière contradictoire devant le tribunal correctionnel d'Ajaccio.
Le premier assassinat de l'année en Corse a été perpétré mardi à Ajaccio où un gérant d?établissement de nuit connu de la police a été criblé de balles au volant de sa voiture non loin d'une manifestation d'enseignants.
Dominique Lorenzi, 40 ans, surnommé "L'Indien", a été tué à 10H45 à bord d'une petite voiture sans permis qu'il conduisait près du rectorat devant lequel plusieurs dizaines d'enseignants étaient rassemblés pour dénoncer une énième réforme de l'éducation.
"On a d'abord cru que c'était des claquements de pétards", a raconté terrorisée une manifestante.
Une douzaine de balles de calibre 9mm ont été tirées au pistolet automatique sur le véhicule de la victime dont le pare-brise était perforé de quatre impacts à hauteur de la tête du conducteur.
Le guet-apens, sur un mode opératoire très professionnel, avait été tendu par un commando de deux individus casqués à bord d'une moto ou d'un scooter arrivant en sens opposé à celui de la victime sur le boulevard Pascal Rossini, l'une des artères les plus fréquentées de la cité impériale, a expliqué le procureur de la République, Xavier Bonhomme.
Le passager a ouvert le feu sur le conducteur, s'approchant ensuite à pied pour l'achever. Les deux hommes sont parvenus à s'enfuir en se noyant dans la circulation.
Une douzaine de douilles ont été trouvées sur place.
La compagne de la victime qui le suivait en voiture a été hospialisée dans un état de choc.

"Violence extrême"

"C'est malheureusement toujours le même sentiment de tristesse et d'impuissance", a déclaré sur place le maire (DVG) d'Ajaccio, Simon Renucci, à France 3 Corse Via Stella.
Le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, a fermement condamné cet "acte de violence extrême", assurant dans un communiqué que "tous les moyens sont mis en ?uvre pour interpeller les auteurs et les déférer devant la justice".
En attendant, une cellule psychologique a été mise en place au rectorat pour assister les enseignants et autres fonctionnaires présents choqués par cette nouvelle scène d'ultra violence dans un quartier où plusieurs règlements de comptes ont déjà été perpétrés.
Très connu à Ajaccio, notamment des services de police, Dominique Lorenzi gérait un pub de nuit dans la cité balnéaire de Porticcio, le Saint James, sur la rive sud du golfe d'Ajaccio. Un vigile âgé de 19 ans avait été tué par balles dans cet établissement le 25 septembre 2011.
Déjà entendu par les enquêteurs dans plusieurs dossiers criminels dans la région d'Ajaccio, la victime, qui avait géré plusieurs débits de boissons de la cité impériale, n'avait jamais été mise en examen.
La police judiciaire et la section de recherche de la gendarmerie ont été co-saisies pour cette enquête.
Lorenzi est la première victime d'un assassinat depuis le début de l'année en Corse. Deux tentatives ont été commises depuis le 1er janvier, notamment contre un individu déjà condamné par la justice, Christophe Pieri, blessé par balles le 1er février en Haute-Corse.

dimanche 10 février 2013


Le JDD affirme que Cahuzac a été innocenté par l'Union des Banques Suisses


Les Suisses blanchissent Cahuzac

Les autorités fiscales suisses excluent que le ministre du Budget ait eu, depuis 2006, un compte UBS à son nom ou à celui d’une société. L’affaire cache-t-elle une manipulation?
La réponse est venue de Suisse en fin de semaine dernière. Jérôme Cahuzac n’a pas été titulaire d’un compte bancaire à l’UBS depuis 2006, date butoir de la convention OCDE d’entraide fiscale liant la France à la Suisse. La réponse des autorités fédérales a été transmise au ministre de l’Économie et des Finances, Pierre Moscovici, qui l’a aussitôt fait suivre au procureur de Paris, en charge d’une enquête préliminaire sur les informations deMediapart. "Il n’y a aucune place au doute dans la réponse transmise par la Suisse", certifie au JDD l’entourage du ministre de l’Économie.
Selon nos sources, les vérifications bancaires complètes effectuées par l’UBS excluent non seulement que Jérôme Cahuzac ait été titulaire en son nom d’un compte à l’UBS, mais aussi qu’il était "ayant droit économique" d’un compte, autrement dit qu’il ait été titulaire d’un compte en sous-main, via une société. "Cette réponse, transmise par l’UBS via les autorités fédérales suisses et les services fiscaux français, dément formellement la possibilité d’un compte, confie une source administrative à Bercy. Imaginer une seconde que les autorités suisses aient pu faire une réponse de complaisance est tout simplement absurde."

Une lettre signée de l’administration fédérale suisse

Dès le 5 décembre 2012, accusé par le site Mediapart d’avoir eu un compte suisse à l’UBS, fermé en 2010 avec le transfert de ses avoirs à Singapour via un certain Marc D., Jérôme Cahuzac a demandé aux services fiscaux, sous sa responsabilité, de rédiger une instruction ministérielle le "déportant de l’ensemble des dossiers le concernant". "Je souhaite, écrit-il au fisc le 7 décembre, que cette polémique ne porte pas atteinte au fonctionnement et à la réputation de l’administration placée sous ma responsabilité. Il me paraît pour cela nécessaire d’établir une distinction claire entre les fonctions ministérielles qui sont les miennes et ma défense personnelle confiée à mes avocats." Le ministre du Budget a donc demandé à la Direction générale des finances publiques (DGFIP), dirigée par Bruno Bézard, que "toute information" le concernant soit transmise exclusivement au ministre de l’Économie et des Finances.
Depuis décembre, Pierre Moscovici "gère" donc en direct le dossier Cahuzac avec les services fiscaux. Le 24 janvier, la DGFIP écrit à l’administration fédérale des contributions de la Confédération suisse. L’administration française sollicite son homologue helvétique au titre de l’entraide franco-suisse et demande, "en application de son article 6", une réponse dans un délai de dix jours. La demande est précise : "M. Cahuzac est-il ou non titulaire d’un compte ou l’ayant droit économique d’un compte?" La lettre mentionne deux périodes : "du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012" et "les années 2006 à 2009". Le jour même, les autorités fiscales suisses transmettent la demande du fisc français à l’UBS.
Avant toute recherche, l’UBS, dans un courrier daté du 25 janvier, écrit à l’avocat suisse de Jérôme Cahuzac, Me Edmond Tavernier, pour le prévenir des informations réclamées sur son client. "Les autorités fiscales françaises ont, par ailleurs, sollicité, à titre exceptionnel, la transmission de ces mêmes informations pour les années fiscales non prescrites, soit de 2006 à 2009", signale l’UBS à Me Tavernier. En clair, l’administration française demande à son homologue suisse de balayer large… Jérôme Cahuzac, par retour du courrier, écrit à son avocat suisse qu’il ne s’oppose à aucune de ces vérifications. Et donne donc un feu vert, au titre de mis en cause, pour que l’UBS transmette le résultat de ses recherches. C’est cette réponse négative, transmise à Paris, qui lève le doute pour la période 2006-2012.

Une enquête préliminaire sur l’authenticité de l’enregistrement

Jérôme Cahuzac peut donc retrouver le sourire. Le ministre du Budget, qui répète depuis le premier jour qu’il n’a jamais eu de compte suisse, a-t-il été victime d’un emballement journalistique ou d’une vaste manipulation? Une partie de la réponse est entre les mains du procureur de Paris, qui a lancé une enquête préliminaire pour "blanchiment de fraude fiscale", et par ricochet, sur l’authenticité de la cassette Gonelle.
Sur cet enregistrement, effectué en 2000 par l’ancien maire RPR de Villeneuve-sur-Lot, Michel Gonelle, une voix attribuée à Jérôme Cahuzac mentionne l’existence d’un compte à l’UBS. Montage? Véritable enregistrement fortuit, Jérôme Cahuzac ayant ensuite fermé ce compte suisse avant 2006? Des vérifications techniques sont en cours, tant sur le support que sur des comparaisons vocales. L’enquête porte aussi sur les personnages à l’origine de l’affaire.
En premier lieu, Michel Gonelle, rival acharné de Cahuzac à Villeneuve-sur-Lot, un homme à la réputation sulfureuse (JDD des 16 et 23 décembre). En décembre 2012, G o n e l l e s ’ e s t d’abord défendu d’être l’auteur de l’enregistrement, avant de l’admettre tout en niant l’avoir remis à Mediapart, accusant l’ancien juge Jean- Louis Bruguière. Une accusation bien peu crédible.Gonelle, "demi- corbeau", est aussi l’avocat de l’ancien inspecteur des impôts Rémy Garnier à l’origine, dès 2008, des premières accusations de dissimulation fiscale en Suisse, ce qui lui avait valu des ennuis avec son administration. Le même Garnier, en bisbille avec Bercy, était venu voir Jérôme Cahuzac en octobre 2012 pour plaider sa cause et réclamer la prise en charge par l’État de ses frais d’avocat. Il a été éconduit. Michel Gonelle est aussi très proche d’un ancien gendarme, détective de Patricia Cahuzac en instance de divorce houleux avec son mari. Quel rôle a joué le trio Garnier- Gonelle-Patricia Cahuzac, aux intérêts convergents contre le ministre, dans le déclenchement de "l’affaire"? D’où viennent les informations, qui se révèlent fausses aujourd’hui, sur la fermeture du prétendu compte en 2010 et son transfert à Singapour?
Dans son dernier mémoire en défense, publié ce vendredi parMediapart, Garnier publie un courrier électronique entre Jérôme Cahuzac et son comptable personnel évoquant un contentieux fiscal sur le paiement de l’ISF, à propos, notamment, d’une collection de montres et d’un prêt familial lors de l’achat de l’appartement des Cahuzac, avenue de Breteuil à Paris.

De "drôles de complicité" à l’oeuvre

De fait, ces éléments ont conduit le fisc à réclamer un surplus d’impôts au couple Cahuzac. Or, selon nos sources, le fisc avait été alerté sur ces deux sujets… par Patricia Cahuzac elle-même. Et le mail envoyé par le comptable à Jérôme Cahuzac, se retrouvant à la fois sur Mediapart et dans le mémoire Garnier, ne peut provenir que de la boîte e-mail du couple Cahuzac… "Cela semble effectivement signer de drôles de complicités, nous verrons les suites à donner le moment venu", réagit un proche du ministre du Budget, confirmant "une certaine tension" dans la procédure de divorce.
Autre élément troublant, dès 2011, une autre équipe de détectives, mandatée par un mystérieux cabinet d’avocat parisien, a aussi enquêté sur le financement de l’appartement des Cahuzac avenue de Breteuil. Le cambriolage au domicile de Jérôme Cahuzac, rue Pierre Ierde- Serbie, en octobre 2012, apparemment anodin à l’époque, serait-il, lui aussi, suspect?
Enfin, selon nos informations, Manuel Valls, le ministre de l’Intérieur, a demandé à la DCRI de vérifier dans ses archives si le service de contre-espionnage avait mené des enquêtes sur Cahuzac. "Aucune enquête, rien, assure au JDD une source à la DCRI. En revanche, en 2009, poursuit cette source, nous avions eu des informations sur de possibles comptes suisses de personnalités politiques françaises, dont vraisemblablement Jérôme Cahuzac, mais nous n’avions pas donné suite, ces informations nous semblant provenir d’un montage." Sollicité, Bernard Squarcini, ancien patron de la DCRI, confirme au JDDavoir stoppé un début d’enquête de son service sur ce qui ressemblait "à un montage de type Clearstream". C’est dire si, depuis plusieurs mois, Jérôme Cahuzac, "intéresse" du monde. A-t-il été victime de ce que les services appellent un "chantier"? L’affaire Cahuzac risque encore de réserver quelques surprises. Mais pas celle des autorités suisses venant confirmer l’existence d’un compte à l’UBS…
Laurent Valdiguié - Le Journal du Dimanche
samedi 09 février 2013
 
 
Jérôme CahuzacParu dans leJDD
Jérôme Cahuzac n'a pas eu de compte en Suisse depuis 2006. (Reuters)
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LE JOURNAL EN LIGNE



La réponse de Mediapart


Cahuzac et le «JDD»: le vent et l’intox

On sait combien Stéphane Fouks, le gourou communicant d’EuroRSCG, qui est en charge des intérêts de Jérôme Cahuzac, a ses petites et grandes entrées au Journal du dimanche. Dans la séquence « blanchiment » du ministre du budget, mise en scène depuis cinq jours, voilà un nouveau développement. Il pose deux problèmes majeurs : l’absence de tout document à l’appui des affirmations du JDD ; la violation des règles du fonctionnement de l’Etat. Le gouvernement peut-il laisser faire cela ?
Le JDD l’affirme donc ce dimanche : « Les Suisses blanchissent Jérôme Cahuzac ». Nous attendions la publication de la totalité ou, à tout le moins, d’extraits ou, au minimum, d’une citation, d’une petite note de ce fameux document des autorités suisses remis la semaine dernière… Rien, pas un mot, pas un extrait. Une photo de l’en-tête de ce document mystère, la reproduction d’une page, les noms ou les fonctions des responsables suisses, la liste complète des questions posées par les autorités françaises… Toujours rien.
L’article entier est construit sur des sources anonymes situées à « Bercy » ou dans l’entourage de Pierre Moscovici. Et le message martelé est le même que celui énoncé depuis cinq jours par les ministres de l’économie et du budget : Jérôme Cahuzac n’a jamais détenu, directement ou indirectement, de compte suisse à l’UBS, au moins durant la période 2006-2012.
Mediapart se serait donc trompé. Pas seulement, ajoute le JDDet notre éminent confrère Laurent Valdiguié (celui-là même qui voyageait avec le marchand d’armes Ziad Takieddine lorsque ce dernier s’était fait interpeller de retour de Libye avec un sac contenant 1,5 million d’euros en liquide) qui croit voir dans cette affaire « une manipulation ».
Nous serions même, ajoute-t-il, les acteurs ou les relais idiots d’un « montage de type Clearstream ». Et là, il s’agit d’une phrase sourcée, la seule de tout cet article, et la citation est attribuée à l’ancien patron de la DCRI, Bernard Squarcini. Ce proche de Sarkozy limogé au lendemain de la victoire de François Hollande est ainsi convoqué au secours des communicants de Bercy. Bernard Squarcini s’était entre autres particulièrement distingué lors de l’affaire Bettencourt, et a été pris dans le scandale des fadettes, c’est-à-dire d’une surveillance illégale des conversations de journalistes pour tenter d’identifier leurs sources.
A trop communiquer, Jérôme Cahuzac et sa conseillère venue d’EuroRSCG Marion Bougeard (celle-là même qui conseillait Liliane Bettencourt dans le scandale des comptes suisses de la milliardaire) communiquent mal. Un nouveau Clearstream ! Quelle aimable plaisanterie… Mediapart maintient l’intégralité des informations jusqu’alors publiées. Oui, M. Cahuzac a eu un compte caché à l’UBS Genève, comme il en atteste lui-même dans un enregistrement que nous avons mis en ligne. Ce compte a été fermé lors d’un déplacement de M. Cahuzac à Genève début 2010 et tout ou partie des avoirs transférés à Singapour.
Mais surtout, le ministre du budget et maintenant le ministre de l’économie Pierre Moscovici rendent la situation insupportable pour le gouvernement comme pour l’opinion. Au-delà du conflit d’intérêts patent d’une administration soudain mobilisée pour « enquêter » sur son ministre du tutelle, quelques règles basiques sont violées.
De deux choses l’une. Ou bien le secret fiscal est « sacré », comme l’affirmait vendredi Jérôme Cahuzac, et alors M. Moscovici, M. Cahuzac et leurs collaborateurs – protégés par le « off » – ne peuvent commenter publiquement ce document, sauf à violer les principes qu’ils brandissent. Ou bien M. Cahuzac décide de faire la lumière sur sa situation fiscale (il le peut évidemment) et ce document des autorités suisses doit être rendu public.
A ce stade de l’affaire pourquoi ne l’est-il pas ? D’innombrables questions se posent sur la nature exacte et le contenu précis de cette note suisse. Pourquoi, par exemple, une source judiciaire a-t-elle expliqué à l’agence Reuters que l’interprétation qui en était faite (un « blanchiment » du ministre) était « inexacte »? Pourquoi les autorités suisses ont-elles été saisies le 24 janvier seulement, quand Mediapart a révélé le scandale début décembre ? Faut-il y voir un lien avec l’avancement de l’enquête préliminaire ouverte par le parquet de Paris le 8 janvier ? Pourquoi les autorités suisses ont-elles mis une semaine seulement à répondre, un délai record quand on compte d’ordinaire en mois, et quelles investigations ont-elles pu opérer ? Cette note repose-t-elle sur un simple déclaratif de la banque UBS, par ailleurs objet de poursuites judiciaires en France, poursuites dans lesquelles le ministère du budget, donc M. Cahuzac, est partie civile ? Ou une véritable enquête a-t-elle été conduite par les autorités ?
Le questionnement pourrait se poursuivre… Mais, à ce stade, il importe de noter deux points et qui ne concernent pas Mediapart. En conduisant une enquête administrative, à sa main et avec son administration, Bercy court-circuite l’enquête judiciaire en cours. La note suisse a été transmise au parquet qui conduit l’enquête préliminaire : s’agit-il de dissuader le procureur de Paris, déjà peu en odeur de sainteté auprès du pouvoir donc sur un siège éjectable, de demander une coopération judiciaire avec la Suisse ?
Deuxième point : ces roulements de tambour sur le « blanchiment » supposé du ministre interviennent alors que des témoins clés de l’affaire devraient être entendus dans les jours qui viennent dans le cadre de l’enquête préliminaire. S’agit-il de les impressionner, c’est-à-dire de faire pression pour qu’ils n’aillent pas jusqu’au bout des révélations qu’ils sont susceptibles de faire aux policiers ?
La communication de M. Cahuzac lui permet certes de tenir la scène médiatique depuis bientôt une semaine. Mais en le faisant, il abîme l’Etat, il met à mal l’impartialité de l’administration, il malmène l’indépendance de la justice. C’est l’autre scandale de cette affaire Cahuzac.